Selon le rapport annuel du groupe de réflexion Germanwatch, publié en marge de la COP21 à Paris, Haïti fait partie des trois pays les plus affectés en 20 ans par des événements météorologiques extrêmes, qui devraient se multiplier avec le réchauffement planétaire actuel.
Dans les Caraïbes, d’après le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), entre 1990 et 2016, Haïti a été le pays le plus touché par les catastrophes naturelles (trois sécheresses, une épidémie, 22 inondations, 23 tempêtes et ouragans), avec une tendance à la hausse à cause des changements climatiques.
Plus de 96% de la population est exposée aux risques naturels, principalement les ouragans, les inondations et les tremblements de terre, selon les calculs de la Banque mondiale qui établit ensuite que la production comptant pour 56% du PIB du pays est située dans des zones à risque de catastrophe, et que les inondations récurrentes entraîneraient donc un impact économique de l’ordre de 2% du PIB.
L’ouragan Matthew, qui a frappé le pays en 2016, a causé des pertes et des dommages estimés à 32% du PIB de 2015, tandis que le tremblement de terre de 2010, qui a tué environ 250 000 personnes, a décimé 120% du PIB du pays.
Alors que les changements climatiques risquent d’augmenter la fréquence, l’intensité et les impacts des événements météorologiques extrêmes, le pays fait toujours face à un manque de mécanismes de préparation et d’adaptation adéquats.
Pour tenter d’y remédier, Haïti a donc lancé, depuis août 2019, son processus d’élaboration de son Plan National d’Adaptation (PNA) dans le but de se doter enfin de cet outil décisif dans l’augmentation de la résilience des secteurs économiques stratégiques du pays. En effet, le processus de PNA vise à faciliter la planification, l’évaluation, le financement et la mise en œuvre de mesures d’adaptation au niveau national et constitue une nécessité pour les pays en développement, notamment les petits états insulaires en développement (PEID) comme Haïti, dans le cadre de leur stratégie de lutte contre les changements climatiques.
Aussi, une confrontation efficace de la panoplie de menaces actuelles (ouragans, sécheresse, etc.) passe par la mise en œuvre d’un plan spécial d’opération en matière de communication et de sensibilisation dans le domaine de l’adaptation. Cette stratégie de communication du processus de PNA a pour vocation, entre autres, de guider le gouvernement haïtien, à court et à moyen terme, dans ses communications auprès de ses partenaires et de l’ensemble des secteurs concernés par ses priorités en matière d’adaptation et d’atténuation.
C’est ainsi qu’en juillet 2020 différentes parties prenantes ont été consultées dans le cadre précis de l’élaboration de cette stratégie quant à la manière dont elles perçoivent les priorités du gouvernement haïtien en matière d’adaptation aux changements climatiques. Les réponses du secteur privé et de la société civile, entre autres, constituent donc des repères indiquant comment mieux impliquer ces parties prenantes dans la mise en œuvre de cette stratégie de communication.
Parmi les nombreux défis auxquels est confrontée la réussite du processus de PNA d’Haïti, citons l’implication du secteur privé haïtien malgré le peu d’intérêt pour l’adaptation qu’il a démontré jusqu’à présent. La stratégie de communication a donc pour mission de sensibiliser ces acteurs clés sur le rôle fondamental qui leur incombe dans la réussite de ce processus.
Lors de l’atelier de validation de cette stratégie, un des représentants du secteur privé a donc fait remarquer à juste titre que pour impliquer ces parties prenantes dans le processus de PNA, l’État haïtien devra monter des projets rentables avec les femmes et hommes d’affaires locaux. Sinon, cela ne servira à rien de s’efforcer de leur montrer que l’adaptation est une stratégie favorisant la compétitivité et la durabilité.
De ce qui précède, il ressort que l’État haïtien, en consultation avec le secteur privé, doit se donner les moyens d’identifier les sources de financement à canaliser dans des actions d’adaptation aux fins d’assurer la durabilité de projets et investissements privés. Ce faisant, l’État haïtien fera de sorte que la participation du secteur privé dans le processus de PNA garantisse la protection de ses propres investissements face aux menaces des catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes.
S’agissant des membres de la société civile, leur éparpillement et l’absence de coordination dans leurs actions constituent à première vue des obstacles pouvant paraître insurmontables.
Cette stratégie propose comme piste de solution de faire appel aux associations de journalistes, précisément le réseau des journalistes spécialisés en environnement, en tant que maillon important dans le relais d’information et de vulgarisation des activités liées au processus de PNA.
Dans son allocution prononcée lors de l’ouverture de l’atelier de dissémination, le ministre de l’Environnement, M. James Cadet, a reconnu le rôle crucial des journalistes, d’une part, dans la réduction des risques de catastrophes ayant rapport aux changements climatiques, notamment dans la sensibilisation des décideurs sur la nécessité de prendre les mesures d’adaptation nécessaires afin de mitiger les dégâts, et d’autre part, dans la communication efficace sur les instruments stratégiques pour leur appropriation pleine et entière par les publics concernés.
Ainsi, s’appuyer sur ce réseau crédible et compétent pour promouvoir l’adaptation comme sujet d’actualité dans le paysage médiatique d’Haïti servira de cri de ralliement pouvant aboutir à la création de la synergie indispensable dans les actions de la société civile en matière d’adaptation. Il s’agira d’une étape préalable à l’instauration d’une table de concertation pour le partage d’expériences et de connaissances qui demeure essentiel à la mise en œuvre des mesures d’adaptation au niveau local.
En somme, cette stratégie préconise, pour la réussite du processus de PNA d’Haïti, des alliances solides entre le gouvernement et la société civile, les universités, les partenaires de développement et le secteur privé.